Quand le Sud nous fait «perdre le nord»…2/2
Taghit dans toute sa splendeur
Escale - Après deux jours passés au nord du pays, entre le froid de Tikdjda et l’air marin de Tipaza, nous atterrissons enfin au Sud, à Taghit, la perle du Sahara.
Taghit est la plus belle oasis du Grand Erg occidental. On y admire une merveilleuse combinaison entre le vert de la palmeraie et le doré des dunes. Le visiteur y sera charmé par les différentes formes dunaires les unes aussi merveilleuses que les autres. Sur les majestueuses dunes de Taghit, on se perd entre les Sioufs, la partie sommitale des dunes, et les Gassi, les couloirs inter-dunaires.
Arrivés à quelques centaines de mètres de la ville de Taghit, nous avons décidé d’abandonner notre bus, pour profiter pleinement du paysage qui s’offre à nos yeux. «C’est le meilleur endroit pour admirer Taghit.
D’ici on domine toute l’oasis. On peut prendre d’excellente photos», nous dit, un photographe qui nous accompagnait et qui connaît très bien la région. On s’est ensuite dirigé vers le centre ville de Taghit ou nous étions avec le sourire et la musique Targui, au niveau d’une modeste auberge de jeune. A l’intérieur, on y trouve deux Kheimates l’une en face de l’autre, séparées par un petit feu. Après avoir dégusté un délicieux plat traditionnel, direction les dunes. Pour y arriver, nous avons emprunté les petites ruelles des ksour, abandonnés par leurs anciens occupants.
Après une quinzaine de minutes de marche à l’intérieur des ksour, en compagnie de Kada, notre guide, nous arrivons enfin «au bout du tunnel» : «Voilà, vous avez en face de vous les fameuses dunes de Taghit ! Il faut faire vite, sinon on va rater le coucher de soleil, un moment qu’aucun visiteur ne veut rater pour rien au monde», nous lance Kada.
Tous les journalistes qui ont pris part à cet Eductour étaient émerveillés par ce qu’ils voient : des vagues de dunes, au sable doré et scintillant, couleur… à quelques minutes du coucher de soleil. «C’est merveilleux», «woow», «c’est époustouflant», «c’est magique»…sont autant de mots qui sortaient de la bouche des journalistes, surtout ceux qui y viennent pour la première fois. Ils n’hésitent d’ailleurs pas à sortir leurs appareils photo, caméras et téléphones portables pour immortaliser ces moments inoubliables. Après un petit moment de contemplation du haut des Ksours, on descend de petits escaliers et tout le monde se précipite pour être le premier à fouler le sable de ces dunes.
Au pied des dunes, on en profite également pour prendre de magnifiques photos avec comme arrière plan une merveille du monde : les dunes de Taghit. Ainsi commence alors l’escalade qui n’a pas été facile pour certains confrères, vu que la journée était trop chargée. Cependant, tous, chacun à son rythme, tiennent à atteindre le sommet pour contempler l’un des plus beau coucher de soleil au monde, pour ne pas dire le plus beau.
Une fois arrivés, tout le monde avait les yeux les yeux rivés sur l’astre rougeâtre qui disparaissait petit à petit à l’horizon. Un moment immortalisé par de sublimes photos souvenir. Suite à quoi, certains ont préféré s’allonger sur le sable, pour reprendre leur souffle, dans un silence saisissant.
D’autres, par contre, ont préféré arpenter encore la dune, et atteindre les plus hauts sommets pour savourer ces moments de fascination. Après une pause bien méritée, ils entament la descente….en skiant ! D’autres encore ont préféré faire un tour sur les quads ou les motos disponibles sur places.
Le Ksar de Taghit transformé en «hôtel»
Site - Ce Ksar de couleur… qui a été construit au 14eme siècle, dispose de trois entrées principales, et est situé dans la vieille ville de Taghit. Il est composé d’environ 160 maisons.
La plupart des maisons sont abandonnées par leurs anciens occupants en 1986. Actuellement, certains ont réhabilité leurs anciennes maisons, et les ont transformées en lieu d’hébergement pour les touristes, ateliers ou magasins d’artisanat. Notre guide Kada, nous a proposé de visiter quelques maisons et quelques ateliers d’artisanat. Les maisons sont joliment décorées par des tapis et autres objets traditionnels. Elle dispose d’un petit salon, et des chambres en premier étage.
Il faut dire qu’il fait bon y passer quelques jours car elles sont très bien aménagées et réhabilitées. Elles ont surtout un avantage de taille pour une maison au milieu du désert : Malgré les températures qui atteignent (ou dépassent) 40° en été, à l’intérieur de ces maison il fait frais. Elles sont construite avec de l’argile et disposent, pratiquement toutes, d’une grande fenêtre, qu’on appelle Ain Eddou, qui permet à la maison de rester aérée et éclairée.
Ces maisons sont ouvertes tout au long de l’année. Leurs propriétaires les proposent pour la location, aux touristes. Une chambre est louée à 1500 da par personne et par nuitée. Certains propriétaires proposent une location à ce prix avec petit déjeuner inclus.
Des menus traditionnels sont également proposés, notamment aux touristes étrangers. D’autres maisons sont, quant à elles, transformées en ateliers et magasins pour la vente des objets artisanaux. On y trouve toutes sortes d’objets, que ce soit des bijoux, des instruments de musiques, des vêtements traditionnels …etc. Omar est l’un de ces jeunes qui a transformé une maison dans ce Ksar en atelier d’artisanat. Il réalise de magnifiques tableaux et des instruments de musique (Guitare, Banjo, Aoud). Ces objets sont tous destinés à la vente, pour les touristes qui affluent chaque année à Taghit.
«On a baptisé cet atelier ‘Africana’, c’est un lieu de rencontre de plusieurs artistes de la région, on passe notre temps à réaliser des instruments de musique. C’est notre façon à nous de préserver le patrimoine de notre région. On reçoit souvent des artistes qui viennent des autres wilayas du pays, Alger, Bejaia, Annaba, notamment. Il y’a aussi certains touristes étrangers qui viennent ici, surtout durant la période de fin d’année. Ça nous permet de vendre certains de nos instruments.» nous dit ce jeune.
Après avoir fait le tour de ces maisons et ateliers, notre guide nous propose de visiter les deux places principales de ce Ksar.
La première est Tadjmiit (la place des sages). A l’époque, Elle servait d’une sorte de palais de justice utilisé par les sages pour régler les problèmes entre les tribus qui habitaient ce Ksar. Dans un petit coin de cette place, on y trouve un moule servant à fabriquer du Baroud qui est généralement utilisé lors des fêtes.
La seconde est Lamguizra, une place ou, à l’époque, on distribuait et partageait la viande quand on sacrifie un mouton. Chaque vendredi, les femmes se rencontrent ici pour chanter et faire la fête, selon Kada, notre guide. Nous achevons notre visite de Ce ksar par Bab anwadey, l’une des trois entrées principales de ce Ksar, qui fait face à la montagne de Baroun et l’Oued Zouzfana.
Une chapelle au cœur du désert
Bâtisse - Le sanctuaire de la fraternité est un site situé dans la localité de Beni Abbes. C’est le lieu de l’Hermitage de Charles de Foucauld.
Cet édifice a été construit avec de l’argile, en 1901, par Charles de Foucauld. C’est en effet la demeure d’un groupe de frères et sœurs de la congrégation du père de Foucauld. Bernard est l’un d’rentre eux, il nous a accueillis sur place, et il nous a fait visiter le site en commençant par la cour de l’Hermitage de Charles de Foucauld. Ensuite, il nous invite à découvrir une petite bibliothèque attenante à la Chapelle, qui est alimentée de livres qui retracent l’histoire de ce lieu.
Cette salle est «décorée» avec de nombreuses photos de Charles de Foucauld sur les murs mais aussi des citations de ce denier. «Si le grain de blé ne meurt pas il reste seul, s’il meurt il donne beaucoup de fruits» lit-on sur l’une d’elles. Bernard nous a montré des photos de cet édifice datant de 1901, et il nous a donné un petit aperçu sur la vie de Charles de Foucauld et sur son parcours jusqu’à Beni Abbes. Ce dernier passait son temps à l’intérieur de cet édifice avec les Touaregs, et il a même réalisé un dictionnaire Touareg-Français.
Il est mort en 1916 à Tamanrasset, il a été enterré à El Golea, selon Bernard. La chapelle de ce site est une vraie église du désert avec un parterre très original (en sable) et de petits tabourets. Cette chapelle a été également construite avec de l’argile, son toit est réalisé avec des troncs de palmier qui ont résisté pendant toutes ces décennies. A l’intérieur on trouve de nombreux dessins de Charles De Foucauld qui, bien sur, avaient été refaits par un autre artiste qui n’a fait que copier ce qu’a dessiné Foucauld en 1901.
Cet édifice, implanté au milieu du désert, dispose également d’un grand jardin, ou on cultive des salades, des carottes… «Cela nous permet d’aller moins souvent au marché mais aussi de pouvoir vendre quelques produits. Il est très fréquenté par les voisins qui récupèrent la mauvaise herbe pour leurs moutons» nous dit Bernard. Le sanctuaire de la fraternité est un site qui reçoit beaucoup de visiteurs qui sont de passage à Beni Abbes. «Ce sont surtout des algériens qui habitent dans le nord du pays qui viennent découvrir leur immense pays» nous apprend Bernard
Les fossiles marins et les gravures rupestres à l’abandon !
Richesse - Situé à environ 15 km de Beni Abbes, le site de «kilomètre trente», appelé ainsi par les habitants de la région, est une autre merveille de la perle de la Saoura.
De loin, ce n’est qu’un vaste espace rocheux, mais sur place on découvre sur ces rochers des fossiles marins remontant à des millions d’années. Ces fossiles marins prouvent que le Sahara était une mer antérieure. «Selon des recherches réalisées avant l’indépendance par des anthropologues et ethnologues français, ces fossiles remonteraient à plus de 360 millions d’années. Ces chercheurs ont pris des échantillons pour les analyser dans des laboratoires en France, Belgique et aux Etats-Unis. Les résultats étaient les mêmes» nous apprend Said Boukhelifa, conseiller au ministère du tourisme et de l’artisanat.
Malheureusement, ce site est délaissé et abandonné par les autorités locales mais aussi par les ministères concernés, notamment celui de la Culture. «Par le passé, on avait pris un citoyen de Beni Abbes, en flagrant délit, entrain de prendre de la roche au niveau de ce site pour s’en servir dans la construction. Parce que lui, il ignore la valeur de ces fossiles, et il ne savait même pas qu’ils existaient» regrette notre interlocuteur.
«Un site pareil devrait être protégé, on ne sait pas mettre en valeur et sauvegarder notre patrimoine. Il suffit de mettre la photo de ce site sur les sites internet des ministères du tourisme et celui de la culture, pour avoir de simples visiteurs mais aussi des chercheurs des quatre coins du monde. Ils viendront spécialement pour voir ce site et ainsi, on pourrait promouvoir la région de Beni Abbes.
Toutefois, l’objectif principal d’une telle action est d’inciter les visiteurs, notamment étrangers, à venir visiter ce site car il remonte à 360 millions années.
Ce qui est énorme, ce n’est pas 36 ans…» conclut M. Boukhelifa. Outre ces fossiles marins, il y’a les gravures rupestres. Nous avons visité un seul site, car il y’en à deux ou trois, selon Kada, notre guide. Ces gravures remontent à l’âge de la pierre. Ce sont des dessins qui représentent surtout des animaux du désert notamment les chameaux qui sont dessinés sur d’immenses roches. Le site que nous avons visité est situé au fond du désert, à plusieurs kilomètres de la ville de Bechar.
Pourtant, sur place nous avons rencontré un père de famille avec son petit garçon, installé sous une petite tente de fortune. Il vend des produits artisanaux aux rares visiteurs qui s’aventurent dans ce coin perdu du Sahara…D’ailleurs, notre présence était une aubaine pour lui afin d’écouler quelques objets. «J’étais content de voir le bus, car c’est vraiment très rare» nous dira cet homme, avec un large sourire.
La mémoire de Béchar
Cette bibliothèque dépend de la Zaouia Ziania Al kandoussia. Elle existe depuis 1098 hidjri, c'est-à-dire depuis la création de la Zaouia. Elle a été fondée par le Cheikh M’hamed Ben Abd Rahmane Ben Abd Ziyan al kandoussi. A l’époque cette bibliothèque contient près de 3000 manuscrits (sciences, histoire, littérature,…etc) Malheureusement ces manuscrits ont été abandonnés, et certains ont été volés durant le colonialisme. Aujourd’hui, il n’en reste que 200. A présent, cette bibliothèque connait une nouvelle ère.
Elle a été rouverte par le wali de Bechar, le 29 novembre 2006, après une période de rénovation du site. Cette rénovation a permis de créer deux salles de lecture, une salle qui contient les manuscrits et une autre pour l’exposition de ces manuscrits. Cette bibliothèque dispose également d’un petit musée qui comprend des objets en marbre et en cuivre, mais aussi quelques travaux de recherche (en langue française) sur l’histoire de la région. «On a plus de 39 titres sur l’histoire de la région de Béchar, ils datent du 19e siècle. Notre objectif actuellement, c’est la préservation de ces manuscrits et ainsi permettre aux gens de les lire.
C’est tout un patrimoine qui est là. Il faut noter qu’environ 700 manuscrits se trouvent actuellement à Aix en Provence, à Marseille. C’est un trésor, on aimerait bien l’avoir. D’autres livres ont été offerts à la bibliothèque nationale du Hamma» souligne M. Tahiri Mebarek, responsable de cette bibliothèque, qui est une partie intégrante de la Zaouia. Notre interlocuteur nous a fait savoir que des rencontres hebdomadaires et mensuelles sont organisées dans le cadre des activités de l’association Alkandoussia pour la protection du patrimoine.
Source Infosoir Brahim Mahdid
Le Pèlerin