1997 - La leçon de fraude du RND
La victoire à la Pyrrhus du parti «bébé né avec des moustaches»
3 533 434 voix(1) ! Tel est le résultat obtenu par un parti né trois mois plus tôt et que la rue algérienne eut l’attendrissante délicatesse de surnommer le parti «bébé né avec des moustaches» !
Avec des moustaches et, semble-t-il, une machine électorale qui aurait été – selon les résultats affichés au Journal officiel — plus performante que celle du FIS en 1991, qui n’a obtenu au bout de la plus grande tentative de remise en cause de l’ordre républicain jamais menée contre le jeune Etat algérien à travers la gigantesque bataille dont nous venons de relater les épisodes les plus obscurs, que… 3 260 222 voix(2). Pourtant, il est impossible pour un Algérien normalement constitué et jouissant de ses capacités mentales et intellectuelles de croire que le RND ait pu un jour, une seule nuit, une seule seconde, être plus puissant (électoralement parlant, bien sûr) que le FIS ! Pour en savoir un peu plus, nous nous sommes livrés à un petit exercice statistique que vous pouvez reproduire vous-mêmes, simplement en prenant soin de disposer, au préalable, du jeu complet des JOproclamant les résultats des quatre élections législatives qu’a organisées l’Algérie depuis l’avènement du pluralisme politique (1991 à 2007). En établissant une moyenne par wilaya des taux de participation enregistrés au cours des scrutins de 1991, 2002 et 2007 (sans celui «boosté» de 1997), vous obtiendrez une moyenne arithmétique «naturelle» sur quinze ans de la participation des citoyens aux élections législatives par wilaya. Sélectionnez, à l’issue de ce petit exercice d’arithmétique électorale, les wilayas qui ont communiqué les taux de participation les plus grossiers et les plus irréels (supérieurs à 80%) aux élections législatives de 1997 qui nous intéressent ici, et comparez ce taux avec la moyenne de participation aux trois autres élections législatives étalées sur plus de 15 ans : la différence que vous obtiendrez correspond au déficit démocratique réel que traîne congénitalement depuis le RND, qui pense qu’une naissance au forceps comme la sienne entre, d’un côté, la côte d’Adam d’une Algérie convalescente et la cuisse de Jupiter de bienveillants et complaisants protecteurs, devait l’autoriser à accepter des largesses électorales aussi incorrigibles au regard de l’épisode historique tragique qui en a favorisé la mouvementée éclosion. Deux exemples particulièrement édifiants : la wilaya de Relizane dont la moyenne des taux de participation aux élections législatives de 1991, 2002 et 2007 était de 46,40% (il s’agit pourtant d’une moyenne de chiffres officiels) a atteint le taux de participation record de 82,33% en 1997. Idem pour la wilaya de Tissemsilt qui aurait «voté» à hauteur de 83,12%, alors que son taux de participation officiel moyen aux autres consultations électorales législatives de 1991, 2002 et 2007 n’était que de 50,31%. Ce qui fait encore le plus mal dans l’évocation du cas de ces deux wilayas, c’est que ces espaces étaient infestés à l’époque par l’hydre terroriste ! Mais le plus affligeant dans cette élection tragi-burlesque des législatives de 1997, reste incontestablement la façon dont les observateurs des pays frères et amis chargés du contrôle de la régularité de ce scrutin ont rendu compte de sa «transparence» exemplaire : «Tous les frères arabes sont fiers que l’Algérie ait pu réaliser le passage vers le multipartisme. » Et de conclure péremptoirement : «Nous n’avons observé aucune irrégularité dans les opérations de vote et de dépouillement. » La «victoire» électorale de 1997 du RND (aux locales et aux législatives) fut effectivement une victoire à la Pyrrhus, ruineuse, que le parti faillit payer très cher dès le retour en force programmé aux législatives de 2002 du grand frère siamois (le FLN), réhabilitation qui le reléguera daredare et sans ménagement au rang humiliant de troisième force politique… après le HMS. Ouyahia, le Phyrrus redevenu par la force des choses subitement soldat défendant les derniers retranchements de ses territoires électoraux d’hier, subitement réduits à une peau de chagrin, crie à son tour au loup. Il connaît parfaitement la forêt et ses pièges. Pour la première fois, il parle de fraude, dont la partition serait – selon ses accusations véhémentes d’alors — mise en musique par les chefs de daïra et les walis sous la baguette magique du ministre de l’Intérieur qui eut à subir momentanément les foudres de l’enfant gâté du système. Aujourd’hui, le premier est Premier ministre et le second vice-Premier ministre.
(1) JORADP n°40 du 11 juin 1997, p. 3, proclamation du Conseil constitutionnel relative aux résultats de l’élection de l’APN.
(2) JORADP n°01 du 04 janvier 1992, p. 2, proclamation du Conseil constitutionnel des résultats officiels des élections législatives du 26 décembre 1991 (premier tour).
Source Le Soir d’Algérie
Dossier réalisé par M’hand Kacemi
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